Aujourd’hui mardi 22 août on fête un anniversaire très spécial : la découverte du vol d’un tableau légendaire. C’était aussi un mardi, mais il y a 106 ans très exactement…

 

 

La découverte du vol de la Joconde

 

Le matin avant l’ouverture du Musée au public, le peintre Louis Béroud, peintre assermenté qui a déjà peint des scènes quotidiennes dans les galeries du Louvre, arrive pour pouvoir s’installer confortablement devant le tableau que serait le protagoniste de sa prochaine œuvre : la Joconde.
Mona Lisa avait été installé depuis quelque temps derrière une vitre et le peintre Louis Béroud avait eu l’idée de dessiner une parisienne qui regarde son reflet dans cette vitre.
En arrivant ce matin Béroud avec son assistant trouvent dans le mur un vide… Mona Lisa n’est pas là.
Ils se sont dit « bon, elle doit être partie dans l’atelier du photographe » et commence quand même à s’installer. Mais après avoir attendu, il commence à s’impatienter et demande qu’un gardien aille vérifier auprès du photographe (récemment la maison Braun avait été déclarée photographe officiel du Louvre).

Louis Béroud

Le gardien revient un peu étonné, la Joconde n’est pas à l’atelier de photographie et le personnel du Louvre va se renseigner auprès de l’administration. Quelque temps plus tard, après une infructueuse recherche, il faut se rendre à l’évidence… Le tableau a disparu !

Le directeur de Louvre Théophile Homolle est en vacances à ce moment(c’est bien le mois d’Août !) et on va chercher son remplaçant Monsieur Georges Bénédicte conservateur du musée. Dans un premier temps on va essayer de régler le problème en interne, mais après avoir regardé partout dans le Louvre il ne reste qu’une solution : appeler la police.

Louis Lépine

A midi on va appeler le préfet de Police Louis Lépine. Moins d’une heure plus tard le musée est envahi par 100 gendarmes et 60 inspecteurs, qui, pour rester discret, vont dire à la presse qu’il y a eu une rupture des canalisations. Le directeur du Louvre qui est obligé de rentrer de ses vacances dans les Vosges à toute vitesse va déclarer à la presse « Voler Mona Lisa ? ça équivaudrait à voler une tour de Notre-Dame ». Cela ne va pas durer très longtemps car quelques heures plus tard la nouvelle se répand : on a volé la Joconde !

L’enquête :

Le musée est fermé tous les lundis à cette époque et seul le personnel qui y travail peut être présent sur place.
Des maçons qui travaillent dans le bâtiment ont déclarés avoir vu la Joconde à 7h lundi matin, mais ils ne l’ont pas vu à 9h, sans s’inquiéter car ils pensaient que c’était les conservateurs qui avaient déplacés le tableau. On déduit qu’elle a été volée lundi entre 7h et 9h du matin.
Le cadre et la vitrine de protection sont retrouvés dans un escalier de service qui descend vers la cours des sphinx.

Le Louvre en 1911

Un homme qui travaille au Louvre comme plombier a vu un homme assis sur les dernières marches de cet escalier habillé en blouse blanche.
La poignée de la porte était cassée, on va la retrouver dans un fossé. Le jardinier avait vu qu’elle avait été jetée par un homme jeune qui marchait d’un pas rapide sur le quai en direction du carrousel.
Bertillon, le père de l’anthropométrie scientifique, a trouvé une empreinte du pouce dans la vitre abandonnée qui protégeait le tableau. Comme le crime semble lié au personnel du musée, on va prendre les empreintes des 257 personnes qui travaillent au Louvre. Mais impossible de trouver des correspondances.
D’importants personnages vont être interrogés comme le peintre Pablo Picasso et Guillaume Apollinaire qui va même être emprisonné puis libéré une semaine plus tard pour manque de preuves.
La police va convoquer les artisans de la société Gobier et tous se présentent pour être auditionné, sauf un Italien qui se nomme Perugguia. La police va décider d’aller chez lui et c’est comme ça qu’ils vont se retrouver à la maison du véritable voleur de tableau avec la Joconde cachée quelque part dans sa petite chambre à ce moment ! La police déclarera n’avoir rien trouvé chez lui et ils ne vont même pas considérer nécessaire de prendre ses empreintes.

Chambre de Vincenzo Peruggia

 

L’opinion publique

L’enquête se révèle inefficace, et beaucoup de critiques acides sont faites contre la police.
Le directeur de musée Théophile Homolle est forcé à démissionner de son poste.
Des critiques plus politiques voit la décadence du régime et même la main des Allemands comme coupables du vol.

Le tableau



On sait très peu chose de ce tableau, il va être peint probablement entre 1503 et 1506 et Leonardo va l’amener avec lui partout où il y va, et même à la fin de sa vie quand il vient en France pour travailler à la Cours de François Ier. Des récentes études prouvent qu’il aurait réalisé des retouches sur ce tableau jusqu’à la fin de sa vie quand il habitait déjà en France !
A différence d’autres tableaux cette peinture à l’huile a été faite sur un panneau de bois de peuplier de 77 × 53 cm.
Le tableau nous donne l’exemple le plus pure d’un technique laborieuse, le sfumato. C’est une technique qui donne un effet vaporeux et des contours imprécis qui, dans ce tableau, est d’une perfection telle que les spécialistes s’interrogent toujours comment elle a pu être réalisée, car aucune trace de pinceau n’est visible et la lumière se mélange parfaitement à l’obscurité. On ne connait pas le type de pigments, la texture des peintures utilisées, le nombres de couches, le temps de réalisation, s’il s’agit de petits coups de pinceau ou s’il est fait aux doigts… toutes les interrogations restent ouvertes.

Mona Lisa aux rayons X où l’on peut bien remarquer l’absence des contours

La modèle du tableau la plus acceptée est la florentine Lisa Gherardini, épouse de Francesco del Giocondo. C’est l’hypothèse de Giorgio Vasari qui a écrit une petite biographie du peintre dans son traité « Le Vite ». Mais la commande n’a jamais été remise à son commanditaire le mari banquier de la présumée modèle.
Un autre texte est écrit par Antonio de Beatis, secrétaire de voyage du Cardinal Louis d’Aragon, qui aurait visité Leonardo Da Vinci dans son Manoir du Clos Lucé. Il parle des trois tableaux que Leonardo avait avec lui et qu’il leur a présenté. Il mentionne le portrait d’une dame florentine réalisé sur le vif à la demande de Julien de Médicis, saint Jean Batiste et une vierge à l’enfant sur les genoux de sainte Anne. Aucun tableau commandé par Francesco del Giocondo n’est mentionné dans ce récit.
Leonardo Da Vinci entre au service de Julien de Médicis (le fils de Laurent le magnifique) au Vatican en 1513. L’hypothèse de la commande par ce noble amène une version bien curieuse ; Leonardo devra réaliser une commande très spéciale pour son fils Illégitime, le cardinal Ippolito de Medicis, qui devrait représenter le portrait d’une mère, car la mère de ce dernier était morte en couche. Leonardo lui aussi était fils illégitime et il ne serait certainement pas resté insensible à une telle commande. Julien meurt avant que le tableau soit achevé, ce qui pourrait expliquer que Leonardo avait pu le garder.
D’autres théories affirment que le model pour le tableau était Salai, comme il l’avait été pour le Saint Jean Batiste ou encore Leonard Da Vinci Lui-même…

Elle va être acheté pour une somme astronomique par le roi François Ier aux héritiers de Da Vinci et ensuite, tous les rois de France vont l’avoir dans leur galerie comme un bien très précieux.
Elle va être protégée par les révolutionnaires et Napoléon premier va l’accrocher dans sa propre chambre aux Tulleries où il s’amuse avec ses valets de chambre en le saluant « Bonjour Madame Lisa ».
Le tableau était déjà à son époque très apprécié, et de nombreux peintres vont réaliser des copies, même contemporaines au tableau.

La Joconde réapparait à Florence

Le voleur attendait patiemment que l’affaire se calme et il arriva un jour où il partit de Paris, en disant à ses amis qu’il rentrait en Italie et qu’il avait quelque chose d’important à faire qui allait lui apporter la fortune.
Il rencontra l’antiquaire Aldredo Geri qui avait mis une annonce dans un journal pour acheter des œuvres d’art. Il lui avait écrit pour le rencontrer et lors de leur premier entretien, Peruggia dit qu’il voulait 500.000 lires (c’était l’équivalent à 100.000 dollars de l’époque !) en échange du tableau. Geri ayant prévenu la police, Peruggia est arrêté dans la chambre de son hôtel.

Chambre de Peruggia à Florence (+)

Les faits racontés par Son Voleur

En se réveillant à 6h le lundi 21 août, il s’est dit que ce jour serait parfait pour aller accomplir cette étrange idée que tournait dans sa tête depuis quelque temps : voler un chef d’œuvre italien au Louvre. Il quitte sa chambre du 10eme arrondissement et se dirige à pied au Louvre où il ne travaille plus comme vitrier depuis 8 mois.
Il va arriver au Louvre vers 7h du matin et il porte sa blouse blanche de travail.
Il va rentrer au musée par la porte Jean Goujon qui se trouve face à la Seine et il va traverser facilement le Louvre qui lors des jours de fermeture comme ce lundi, ne disposait que de 12 gardiens.
Il n’était pas sûr de vouloir prendre la Joconde car il y avait dans le salon carré d’autres chefs-d’œuvre Italiens mais il semble s’être décidé sur le moment, probablement pour la petite taille du tableau.


Il décroche sans grande difficulté le tableau et part du salon carré jusqu’à une porte de service située dans le même salon où de nos jours se trouve la Joconde. A cet endroit-là il dépose le tableau à côté des copies entreposées sur le sol à mi- palier et descend pour essayer de trouver une sortie.
La porte en bas était fermée à clef et à l’aide d’un tournevis il va essayer d’ouvrir et il va démonter la poignée. Un plombier va descendre les escaliers à ce moment et Peruggia reste assis. En remarquant que la poignée est cassée il va lui demander s’il sait pourquoi, mais Peruggia répond avec sang-froid « je ne sais pas ». Le plombier repart alors et referme la porte derrière lui avec sa clef.

Il se rend compte qu’il est enfermé et revient au palier, démonte le cadre de la Joconde, cache le tableau avec sa veste blanche et ressort par le même endroit où il est rentré. Il prend un bus dans la rue mais redescend aussitôt car le bus n’allait pas dans la bonne direction. Il prendra ensuite un fiacre qui le ramènera chez lui.

Le procès

Il va déclarer lors de son procès avoir été complètement motivé par des causes nationalistes.
Il sera déclaré comme « faible d’esprit » par une analyse psychiatrique, et ne sera condamné qu’à 1 an et 15 jours de prison.
Malgré le fait qu’il avait déjà essayé de le vendre en Angleterre l’année précédente – ce qu’il niera lors du procès – et qu’il avait demandé une grande somme d’argent à l’antiquaire italien, la version de son psychiatre le donnant comme irresponsable de ses actes, s’est imposé. Sa peine fut à posteriori réduite à 7 mois et 8 jours.

 

Vincenzo Peruggia :



Il avait commencé a travailler très jeune et avait émigré en France. Son métier était peintre en bâtiments ; métier qu’il a dû arrêter pour une trop grande exposition au plomb et être tombé malade de saturnisme. Nous savons de nos jours que cette maladie peut être responsable de troubles mentaux et est propice à la criminalité.
A cause de son origine italienne, il va devoir supporter dès son arrivée en France des insultes et des traitement xénophobes dans son entourage, ce qui va l’affecter profondément.
Il avait un casier judiciaire car il avait fait l’objet de deux condamnations : l’une pour agression sur une femme, et l’autre étant une tentative de vol de matériaux sur la voie publique. Il avait eu aussi d’autres problèmes pour port d’armes non autorisé et des titres de séjour non en règle.
Il travaillera pour la société A. Gobier. A cause de problèmes dans la sécurité des musées, on décide d’installer au Louvre des verres pour protéger les œuvres les plus importantes, et c’est la société Gobier qui va s’occuper. Le musée confie la mise sous verre de 1600 chefs-d’œuvre et Vincenzo serait l’un de 5 hommes en charge de couper et polir le verre.
Pendant ses travaux au Louvre il découvre avec surprise la quantité d’œuvres de son pays natal et il va associer ça avec la campagne napoléonienne qui spoliait les pays conquis. Il développe une étrange idée : Si j’arrive à apporter un de ces tableaux en Italie, ça serait un acte patriotique envers mon pays.
Peu après sa sortie de prison, il se fera embaucher par l’armée italienne pendant la première guerre mondiale et se fait capturer par les autrichiens qui vont le garder pendant 2 ans. Après la guerre, comme il n’y a pas de travail en Italie, il va retourner à Paris.
Plus tard, Il amènera sa jeune épouse au Louvre pour le montrer le tableau qu’il avait volé sans la moindre peur d’être reconnu.
Il meurt le 8 octobre 1925 (le jour de son anniversaire) ; il allait fêter son anniversaire avec sa fille d’un an quand il est mort foudroyé par un infarctus.